La peur de ma vie
Eléa va à la garderie le soir après l'école. Le lundi et le vendredi, la garderie a lieu dans sa classe, et le mardi et le jeudi c'est chez les moyens. Mardi, je vais chercher Eléa à l'école, chez les moyens, donc. J'entre dans la classe, je dis bonjour à Patricia, l'assistante maternelle des moyens, je cherche Eléa du regard... et je ne la vois pas. Patricia, perplexe, me dit : "Mais je ne l'ai pas vue, Eléa, aujourd'hui". Je blémis et répond : "Pourtant son papa l'a bien déposée à l'école ce matin". Patricia demande à la cantonnade si des enfants ont vu Eléa, et là il y a une petite qui dit : "Oui, moi je l'ai vue, elle est partie avec quelqu'un". Alors là, mon coeur s'est arrêté de battre, 1/4 de seconde. Ou peut-être plus. Des images toutes plus horribles les unes que les autres ont jailli dans mon esprit, incontrôlables. Je l'imaginais partie avec un inconnu, perdue à jamais. J'avais le coeur au bord des lèvres. Je dis à Patricia : "Là je suis très très inquiète". Patricia me dit : "Avant de sonner l'alarme, allez voir à la danse" (le mardi c'est activité extra scolaire de danse, j'avais voulu y inscrire Eléa en début d'année, mais il n'y avait plus de place). Je descends en courant au cours de danse, et là je vois Eléa tranquillement en train de se rhabiller, toute contente d'avoir fait de la danse. J'ai ressenti un tel soulagement, c'est comme si le sang se remettait à circuler dans mes jambes. En fait, mamzelle était dans la cour avec sa grande copine Marie-Amélie (qui, elle, va à danse) et c'est la grande soeur de Marie-Amélie qui a emmené sa petite soeur à la danse et qui a embarqué Eléa au passage. La prof de danse, une fois Eléa à l'intérieur, ne pouvait plus la mettre dehors donc elle l'a gardée tout le cours. Eléa, bien sûr, a adoré, ne voulait plus partir, et rêve d'y retourner ! La prof de danse m'a dit : "Je crois que vous allez être obligée de l'inscrire l'année prochaine". Sur ce, Patricia descend, toujours blême, pour s'assurer que j'ai bien retrouvé Eléa, et a poussé un gros ouf de soulagement en la voyant. Le soir, du coup, Eléa, qui accorde sa confiance les yeux fermés et parle à tout le monde, a eu droit à une grande tirade sur le fait de ne jamais suivre un inconnu, même s'il lui propose de lui donner des bonbons. Je ne suis pas sûre qu'elle ait compris la gravité de la chose... Elle a une foi inébranlable en la vie, et pour elle tout peut être réparé, tout peut être guéri... Mais moi, après avoir eu la peur de ma vie, je vais remettre régulièrement le sujet sur le tapis, jusqu'à ce que je sois sûre qu'elle ait compris ! |